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Post sur le pouce : c’est qui, Bernard ?

« Je me suis dit : les escaliers, il ne te reste plus que les escaliers. Si tu prends l’ascenseur, alors ça voudra dire que tu as vraiment renoncé à tout. »

Voici, en quelques mots, l’essence de notre Bernard, publié par David Foenkinos en janvier 2010 aux éditions du Moteur. Cette petite nouvelle, qui raconte les péripéties d’un homme passablement paumé, est d’une légèreté confondante. À tel point confondante, que l’on se demande, au final, si cet ouvrage en valait vraiment la peine. Bon alors, c’est qui, ce Bernard ? Bernard, c’est un homme simplement « comme tout le monde ». Un homme bien assis dans le train de la vie, avec femme (Nathalie) et enfant (Louise) à son bord. Sa vie, c’est la routine. Une routine rassurante dont il ne s’écarte que le soir, pour s’amuser à des montages financiers pas tout à fait légaux.

« Le lendemain, c’était mon anniversaire et je pouvais parfaitement dérouler le programme. Elle allait m’offrir une place pour un ballet sans intérêt (je ferais semblant de m’extasier devant un danseur ouzbek anorexique) et, ensuite, nous irions dîner dans le restaurant où nous avions nos habitudes. Cette soirée ne comporterait pas la moindre surprise, ma vie était une ligne de métro. »

Et puis, tout à coup, badaboum. Il rencontre Isabelle. Commence alors une relation adultérine toute sympathique, qui l’écarte des sentiers battus et lui fait redécouvrir les joies de la chair. Mais Isabelle est un brin psychopathe, elle a une dent contre les hommes : elle écrit à Nathalie. Nathalie se fait rapidement une raison : « Toutes les femmes de mon âge sont cocues. Pourquoi devrais-je être une exception ? ». Mais quand Isabelle balance Bernard à son patron, sur son activité financière nocturne, alors là, c’est le pompon. Bernard se fait licencier, Nathalie demande le divorce, Isabelle stagne dans sa psychopathie structurelle. Et Bernard retourne vivre chez ses parents. Plus de femme, plus de travail, seuls les chocolats chauds de sa mère (et non sa mère) lui donneront un peu de réconfort. Le retour dans sa chambre d’ado lui donne une nouvelle chance de se construire. Ne serait-il pas passé, au final, à côté de sa vie ? Est-il passé à côté de qui il était vraiment, à côté des personnes qu’il aimait vraiment ? Cette question s’avérera étonnement contagieuse. Elle va permettre à d’autres, à ses parents, à sa fille, de s’ouvrir à eux-mêmes et à lui. Et alors, il va en comprendre des choses, notre Bernard. Et, au milieu de ses interrogations existentielles, Bernard va rencontrer Sylvie. Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants. Fin de l’histoire.

Mon récit a dû vous paraître un brin morose. Mais, moi qui suis une des (nombreuses !) admiratrices de David Foenkinos, je dois avouer que je suis un peu déçue. On a l’impression qu’il s’endort sur ses lauriers et roupille tranquillement : il sait ce qui nous plaît, le David. Ses phrases d’une simplicité incroyablement poétique, ses situations loufoques, ses personnages décalés qui nous ressemblent. Mais là, on sent que c’est un peu bâclé : les personnages ne font que de brèves apparitions finalement assez insignifiantes (les personnages d’Isabelle, de Sylvie, auraient mérité d’être un peu plus développés), on passe du coq à l’âne, on reste sur notre faim. Ce petit ouvrage reste toutefois très sympa à lire. Mais, un conseil : si vous ne connaissez pas David Foenkinos, foncez plutôt sur Le potentiel érotique de ma femme ou sur son chef-d’œuvre, La délicatesse, un ouvrage d’une poésie et d’une beauté indicible…

David Foenkinos, Bernard, 2009

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